Derniers jours en Inde
Mumbai, dimanche 11 février 07:00 heure locale
Réveillé de bonne heure, pour une fois qu’on pouvait faire la grasse matinée...
Du 13° étage de l’hôtel Krishna Palace, depuis la large baie vitrée de ma chambre, Mumbai (Bombay) s’étale sous mes yeux. Un soleil orangé émerge timidement entre les buildings, à travers le fog permanent qui plane sur la ville. Mumbai, Delhi et Calcutta sont les 3 villes d’Inde les plus polluées. En arrivant hier depuis Poona par la route, le paysage était magnifique, mais à l’approche de la ville, nous l’avons reconnu ce brouillard fait de gaz d’échappement et d’autres émanations qui nous a enveloppé toute la semaine à Calcutta. Ils vont avoir de sacrés problèmes de santé dans ce pays à élever des enfants dans cette atmosphère - quasi irrespirable aux heures de pointe.
Hier soir, dernier concert de la tournée Mezcal Jazz Unit avec Bickram Ghosh (tablas) et Abhishek Mallick (sitar). Concert achevé sur les chapeaux de roue, car ces 2 là avaient un avion à prendre pour Dubai pour un concert le lendemain à Dubai, en présence du très controversé 1er ministre indien Narendra Modi.
Mais on en était resté au concert du 6 février à Lucknow (voir jours précédents). Le temps qui m’a manqué et parfois une mauvaise connexion internet ont fait patiner ce blog que je reprends maintenant que les hostilités ont cessé.
Mercredi 7 février: Chandigarh
Annonce du concert à Chandigarh sur le blog de Bickram
Chandigarh a une place particulière dans le monde que peu de gens connaissent. Sa particularité est que c’est une ville construite de toute pièces en pleine campagne, après la partition de l’Inde de 1947. Décidée par Nehru pour être la nouvelle capitale du Pendjab alors divisé en 2, Chandigarh située à la frontière des deux États, devient alors un territoire capitale à la fois du Pendjab et de l'Haryana.
Mais sa spécifié est d’abord architecturale: sa réalisation a été confiée à Le Corbusier qui a voulu en faire la première ville moderne. Soixante ans après, la ville conçue pour 150 000 habitants en compte 9 millions, avec les « slums » (bidonvilles) qui vont avec, le béton a mal vieilli. Un coté Bilal assez fascinant. Voir cet article passionnant à ce sujet: (https://www.latribune.fr/regions/smart-cities/inde-le-reve-evapore-de-chandigarh-463575.html
Notre concert se déroule au bout de la place centrale sur une plateforme située derrière le grand bassin, dont on a éteint pour la circonstance les jets d’eaux immenses. C’est un peu un drôle de choix, car vous sommes 10 m au dessus de la place et séparés des gens par ce bassin vide…Il fait froid, il y a du public agglutiné derrière le bassin mais comme la place est immense… Nous ferons du coup un concert plus court, un peu frustrant à mon goût, au bout de cette agora grouillante comme un marché aux puces de vendeurs et de badauds. L'accueil de l'Alliance française est impeccable.
Nous retrouvons après le concert des amis à moi, qui sont de passage à Chandigarh précisément ce jour là, lui réalisateur avec qui j'ai travaillé souvent, elle haut responsable dans la Fondation Le Corbusier.
Départ comme d’habitude le lendemain matin tôt pour aéroport, direction Poona (Pune), avec escale à Delhi, encore ensommeillés et les tripes en vrac (comme toujours en Inde), plus une bronchite due à la pollution et à la clim.
Photos d'Elizabeth Riley: Chandigarh
Sur l'Agora de Chandigarh
Avec Emma de Decker (Gatecrash) et Sylvain Choin (Alliance française de Chandigarh)
Shamick, l'assistant de Bickram et Abhishek
Jeudi 8 février: Ville de Pune, Poona Music Society
Notre concert n'est que le lendemain, mais un showcase est prévu dans un bar branché de la ville, lieu assez sympa en terrasse couverte. Il n'y a pas le backline complet et le pauvre Daniel doit jouer du Cajon, ce qu'il sait faire, mais le sonorisateur le sous mixe dans les retours si bien qu'il ressort furieux de l'expérience, avec le sentiment d'avoir fait de la figuration.
Dans l'après midi, devant l'hôtel, un cortège de mariage très coloré et joyeux, avec musiciens et camion sono envahit la rue et nous embarque pour danser avec eux. Ils sont à l'hotel à coté et partent après 2 jours dans un village à la montagne. Le père du marié fait danser Eliza, ambiance maghreb avec toutes les couleurs des femmes en saris. Ils veulent nous embarquer avec eux. Si on n'avait pas eu autre chose à faire, c'est sûr on y serait allé!
Petite vidéo faite au portable par Jean Marie, entrainé par la famille du marié.
Le lendemain, balance et concert
L’association qui accueille le concert organise généralement des concerts de musique classique occidentale, donc acoustiques. Notre performance nécessite de la sonorisation et comme Bickram aime bien entendre sonner ses tablas assez fort, il y aura une petite tension tout au long de l’installation entre lui et l’organisateur à ce sujet. Le pauvre sonorisateur, pris entre 2 feux, se fera engueuler des 2 cotés et convoquer dans la loge de Bickram à l'entr'acte.
Le concert a lieu en salle, c’est la première fois: les 3 précédents concerts ont eu lieu soit en plein air, soit sous chapiteau. C’est un petit auditorium de collège, le son est bon. Nous donnons là, en 2 parties notre meilleur concert depuis le début. La connexion se fait de mieux en mieux entre les 2 univers musicaux. Comme souvent dans ces projets, le problème est que nous faisons le chemin vers la musique « traditionnelle », mais que le chemin inverse ne se fait pas aussi spontanément, les musiciens « trad » restant souvent dans ce qu’ils savent faire. Et ici, ce qu'ils savent faire ces 2 là est prodigieux! Mais la mayonnaise prend mieux au fur et à mesure des concerts. Au final, public et organisateurs ravis, super resto avec l’Alliance française et la Poona Music Society et départ le lendemain matin un peu moins tôt pour Mumbai où nous donnerons le dernier concert.
Showcase Pune (Photos Eliza)
"Il jouait des tablas debout, c'est peut être un détail pour vous..."
Pune: cortège de mariage dans la rue (photos Eliza)
Le père et la mère du marié nous embarquent dans la noce
Concert à Poona Music Society (photos Eliza)
Annonce du concert à Pune sur le blog de Bickram
Samedi 10 février: G5A, Mumbai
Le trajet se fait par la route et à l’arrivée à Mumbai, Emma de Decker nous quitte pour rejoindre un autre groupe qu’elle doit driver sur la fin de sa tournée. Emma est une super attachée de prod, manager de tournée et organisatrice d’événements jazz en Inde, au sein de sa compagnie Gatecrash. Nous l'avons rencontrée en 2006 lors de notre premier séjour en Inde et avons participé notamment en 2015 au superbe festival jazz de Goa qu'elle a créé avec 2 associés, mais qu'elle a du lâcher au bout de 3 éditions, faute de moyens pour le faire vivre. Le problème pour ce genre de musique - comme souvent ailleurs mais particulièrement ici - est financier. Il y a des lieux mais pas les moyens qui vont avec. Pour tourner en Inde, sans support financier d’organisations européennes, il faut accepter le cachet indien maximum 5 000 roupies soit 60 euros...ou jouer de la techno qui marche bien ici.
Le G5A est un lieu culturel multi activités. La salle de concert est agréable, scène de plain pied, public sur gradins, large ouverture de scène, un peu comme le JAM à Montpellier, avant que la scène soit surélevée.
Nous faisons dans une ambiance chaleureuse notre meilleur concert, à mon humble avis. Il aurait du être plus court pour que Bickram et Abhishek puissent être à temps à l'aéroport, mais le plaisir a duré plus longtemps et le départ a pris une demi heure de retard. A peine le temps de se dire au revoir, à bientôt...
Parmi les invités se trouve un fameux tabliste Fazal Qureshi, petit frère de Zakir Hussein, qu’a invité Bickram Ghosh. On aurait bien aimé le rencontrer à la fin du concert, mais il nous a tous (les français) superbement ignorés, même lorsque Bickram et Abhishek ont du partir prendre leurs avion pour Dubai. Par contre une chanteuse indienne, apparemment assez connue, également invitée de Bickram est, elle, venue nous saluer et nous remercier chaleureusement du concert qu’elle a beaucoup aimé.
Une semaine de résidence et 5 concerts plus tard, la connexion avec Bickram Ghosh s’est opérée facilement, 12 ans après notre première rencontre et de façon plus détendue, avec de réels rapports humains d’affection et de respect entre nous. Et puis nous avons découvert ce magnifique musicien Abhishek Mallick que nous avons dans l’idée d’inviter en France dés que possible.
Des suites sont envisagées, un Cd partir des enregistrements faits à Calcutta et peut être des" live" tous enregistrés par Shamick, l’assistant de Bickram et pourquoi pas une tournée en France?
Ce dernier jour à Mumbai, relâche, shopping et balade avent de prendre l’avion lundi à 02:00.
Merci à Emma de Decker, la superbe, à Elizabeth Riley notre manager bien aimée pour avoir rendu cette tournée passionnante et efficace.
Leaving Emma (photos Eliza)
Emma remet solennellement à Eliza la charge immense de gérér les Kakemonos où sont inscrits les noms des glorieux sponsors de la tournée.
Dernier concert au G5A, Mumbai (photos Eliza)
Annonce du concert à Bombai sur le blog de Bickram, très Bollywood!